Comment nourrir 7 milliards d'humains

Le Monde daté du 21 octobre 2011 a publié un excellent article intitulé « Comment nourrir, loger, pourvoir aux besoins, soigner 7 milliards d’humains vivant dans un monde aux ressources limitées ? ». Nous en analysons ici un extrait.

En 2009, dans le cadre de l’enquête Agrimonde, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) ont imaginé deux scénarios pour le futur : dans le premier, les tendances actuelles se prolongent d’ici à 2050, et priorité est donnée à la croissance économique et au  » bien-être immédiat des hommes «  ; le second privilégie  » la durabilité des systèmes agricoles et agroalimentaires « .

Le premier scénario prolonge la politique actuelle d’une agriculture productiviste. Il nécessite une hausse de 590 millions d’hectares des surfaces cultivées ou utilisées pour l’élevage (un milliard et demi d’hectares sont exploités aujourd’hui), une perte de biodiversité, une montée des problèmes environnementaux et une accélération du changement climatique.

Le scénario alternatif suppose une convergence mondiale vers un nouveau mode de consommation : les disponibilités alimentaires seraient alors de 3 000 kilocalories par jour et par personne (dont 500 d’origine animale), soit une diminution de 25 % en moyenne pour les populations des pays riches par rapport à leur régime actuel, mais une augmentation d’autant pour les habitants d’Afrique subsaharienne.

La nécessité d’une transition vers un nouveau modèle agricole mondial est de plus en plus évoquée, y compris au sein des institutions internationales :  » Il faut garantir une transition des systèmes alimentaires et agricoles vers des systèmes moins gourmands en énergie fossile et moins polluants « , écrivent ainsi les experts du Comité de la sécurité alimentaire, plate-forme des Nations unies, dans un rapport présenté lundi 17 octobre.

Dans 9 milliards d’hommes à nourrir (François Bourin, 432 p., 22 euros), livre qu’ils ont récemment cosigné, Marion Guillou et Gérard Matheron, qui président respectivement l’INRA et le Cirad, concluent sur six recommandations :

  • Accentuer les efforts de recherche ;
  • Mettre l’accent sur les partenariats internationaux et le partage d’informations ;
  • Réinvestir dans l’agriculture ;
  • Limiter la volatilité des prix des denrées alimentaires ;
  • Faire évoluer les modes de consommation ;
  • Repenser la gouvernance mondiale en matière de sécurité alimentaire.

 » On peut gagner énormément, rien qu’en travaillant sur les irrationalités du système, affirme Olivier De Schutter, le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation. On insiste beaucoup sur la nécessité de produire plus pour répondre à une demande en croissance. Mais on oublie les gaspillages alimentaires ou les biocarburants qui entrent en concurrence avec les cultures alimentaires… « 

Selon une étude parue en 2009, 40 % de l’alimentation disponible aux Etats-Unis est gaspillée chaque année.

Cette étude est éclairante à plus d’un titre :

  • D’abord, elle confirme que la politique agricole actuelle, fondée sur une démarche productiviste sans vision à long terme, nous conduit droit dans le mur. L’affaire des algues vertes sur les plages bretonnes en est une preuve éclatante à l’échelle de la France.
  • Ensuite, d’un point de vue général, elle démontre, si c’était encore nécessaire que le simple jeu des marchés est incapable de répondre aux défis mondiaux actuels.
Seule une nouvelle gouvernance mondiale, appuyée et soutenue par une opinion publique avertie des enjeux du développement durable, peut permettre de résoudre les problèmes mondiaux qui s’accumulent.
Dominique Bénard

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